Histoire de Fresselines
par R. LASNIER-CONFOLANT, curé de la Croix

Ce petit ouvrage a été publié en 1902 par R. LASNIER-CONFOLANT, Curé de la Croix.

(On retrouve les mêmes informations historiques dans l’imposant « Dictionnaire Historique de la Creuse » publié en 1902 par A. Leclerc, disponible aujourd’hui encore aux Éditions du Bastion).

Il ne s’agit certes pas du travail d’un historien, mais il apporte quelques renseignements intéressants.

En voici quelques EXTRAITS, ci-dessous, fidèles à l’original et regroupés par thèmes.

Ne manquez pas  les chapitres lyriques (sur les paysages) ou savoureux (sur les habitants de Fresselines).

Ce livre est également disponible, dans sa totalité,  en téléchargement au format PDF en cliquant ici.

Le bourg de Fresselines, assis sur un promontoire, domine les deux Creuses, qui l’entourent comme une ceinture; on dirait une presqu’île dont l’extrémité se termine au confluent des deux rivières. Le paysage environnant, d’un pittoresque remarquable, attire en grand nombre les artistes et les curieux. Les côtes de Confolant, du Palot, de Vervis, de Puyguillon, de la Renauchat, des Ages, du Puyrageau, des Roches font rêver le visiteur avec leurs aspects variés, gracieux, sauvages.

Ici, c’est un frais vallon; là, une colline abrupte, une gorge sauvage; plus loin, un grand bois; à côté, un précipice, le lit d’un torrent, une fontaine aux eaux claires et limpides, un chemin creux et ombragé, etc.

L’âme éprouve un charme mystérieux en contemplant ces gracieux caprices de la nature ; elle remonte sans effort vers Dieu, centre de tout bien, auteur de toutes les merveilles.

Il n’existe aucun document qui indique l’origine du bourg de Fresselines.

Il est à croire qu’il y avait là une bourgade à l’époque gallo-romaine et même du temps de nos pères les Gaulois.

Une monnaie d’or trouvée à Fresselines, au XVIIIe siècle, porte une tête laurée à droite, avec cette inscription : « Imper. – Cesar. – Tray. -Hadria. – Aug« . Sur le revers, Jupiter, assis, tient de la main gauche une lance; de la droite, un foudre.

Plusieurs sarcophages ou tombeaux en pierre ont été trouvés au champ du Palot, qui pouvait être un cimetière gaulois ou gallo-romain.

Fresselines est appelé :

  • « Parochia de fraexeninis« .  Année 1163. Cartulaire d’Aubepierre.
  • « Parochia de fraexelinis »  Année 1559. Cartulaire d’Aubepierre.
  • « Parochia et mensura de fraisselinis »  Année 1279. Cartulaire d’Aubignac.
  • « Cappella de fresselinis »  Pouillé du XIVe siècle.
  • « Fresselines »  1370. Cartulaire d’Aubepierre.

L’église se compose de trois travées, séparées par des arcs-doubleaux.

La voûte entre chaque arc-doubleau est soutenue par des nervures qui se croisent (style ogival). Selon toute probabilité, elle remonte au XVe siècle.

Une note, que nous devons à M. le chanoine Leclerc, semble confirmer cette opinion. Le 25 décembre 1455, Michel, évêque de Nio « in partibus », délégué pour la visite du diocèse par Pierre de Montbrun, évêque de Limoges, consacra l’autel de l’église de Fresselines. L’église était donc nouvellement construite, puisqu’un évêque, en tournée pastorale, consacra l’autel.

Autrefois, le cimetière occupait une partie de la place actuelle. Il fut reculé vers le milieu du XVIIe siècle à deux cents mètres de l’église et transporté, il y a quelques années, aux abords de la côte de Puyguillon.

A une époque reculée, sur l’emplacement du puits de la place, on apercevait le pilori, c’est-à-dire le poteau avec carcan, où l’on exposait en public, les jours de grandes fêtes, après sentence du juge, certains criminels.

Ce genre original de correction avait, dit-on, une efficacité souveraine.

Ce château, situé comme un nid d’aigle au sommet de la côte de Puyguillon, domine la petite Creuse et embrasse un horizon assez étendu.

Il fut détruit par les Anglais pendant la guerre de Cent ans. Le comte de la Marche obtint du roi Charles VII l’autorisation de le faire reconstruire. La grosse tour date, dit-on, de cette époque.

L’an 1390, Morel de La Marche, dans son testament, demande à être enterré à l’abbaye d’Aubepierre dans le tombeau de ses pères. Si les religieux refusent d’aller chercher son corps, il veut être inhumé dans l’église de Fresselines.

L’an 1524, Montaignac d’Etansannes, qui avait pris part à la défection du connétable de Bourbon, vint se cacher pendant quinze jours au château de Puyguillon et s’enfuit ensuite en Italie.

L’an 1530, sentence du sénéchal de Fresselines condamnant noble homme François de la Marche, seigneur de Puyguillon, à payer, à l’abbaye d’Aubepierre, six sétiers de blé.

Ce château resta la propriété de la famille de la Marche jusqu’au XIXe siècle.

Mme la comtesse de la Marche, née de Loubens de Verdalle, le vendit, en 1865, avec la terre, au comte Henri de La Celle, qui en est actuellement propriétaire.

Le comte de la Marche n’émigra pas pendant la grande Révolution.

Il conserva son château et ses biens, qu’il légua, faute d’héritiers directs, à son frère du château de Pierrefolle, dont les biens avaient été vendus nationalement à la suite de l’émigration.

A l’époque où l’État percevait l’impôt de la gabelle, impôt impopulaire sur le sel, Fresselines possédait un officier de la gabelle avec plusieurs employés ou gabelous chargés d’empêcher la fraude et d’arrêter les faux sauniers.

Le père Jean Combe, mort au Pin en 1853, à l’âge de 90 ans, fut officier de la gabelle avant la Révolution. La maison de M. Timon Combes, son petit-fils, siège jadis d’un dépôt de sel et où l’on aperçoit encore des mâchicoulis, fut, dit-on, le théâtre d’une scène sanglante à une époque reculée. Des gens du Berry arrivèrent un jour au dépôt pleins de fureur,

enfoncèrent la grosse porte ferrée à l’aide de l’aiguille d’une charrette à bœufs , se précipitèrent sur les deux gardiens qu’ils

tuèrent, coupèrent en morceaux et couvrirent de sel dans un grand saloir en granit qui existe encore.

Ce crime donna lieu à un procès retentissant dont nous ignorons les résultats. Cependant, s’il faut en croire la tradition, les trois plus coupables dans cet attentat furent pendus à l’orme situé en face de la susdite maison et qui existe encore, bien que vieilli et mutilé.

Voir l’article historique, très complet, de Jeannine Berducat sur cet épisode sanglant. Cliquer ici pour vous rendre sur cette page.

Depuis de longs siècles, Fresselines envoie chaque année aux provinces environnantes, surtout à la capitale, son contingent de maçons, charpentiers et tailleurs de pierres. L’hiver ramène au pays natal une partie de ces rudes travailleurs.

Le terrain argilo-siliceux, couvert dans maints endroits de roches schisteuses, n’est pas toujours assez rémunérateur. L’agriculture cependant y a fait des progrès sensibles. Les engrais chimiques employés avec intelligence ont donné d’excellents résultats. De mauvais terrains occupés par des châtaigneraies ont été défrichés et utilisés par la culture. Des communaux incultes ont été partagés et ensemencés.

Le métayage est le mode de fermage le plus usité.

La commune compte une quinzaine de domaines.

Les deux Creuses qui encadrent le bourg et arrosent une partie de la commune, fournissent d’excellents poissons.

Qui pourrait dire le nombre des pêches merveilleuses opérées sur ces bords enchanteurs! Toutes les variétés s’y donnent rendez-vous, depuis la minuscule ablette jusqu’au saumon géant. Malheureusement, la guerre parfois peu loyale faite à ces bons habitants de l’onde tend à en diminuer le nombre.

La Creuse, avec ses abords pittoresques, ne pouvait manquer d’inspirer les muses. Elle a maintes fois été chantée par les poètes.

Les Fresselinois sont intelligents, âpres au gain, durs au travail, tenaces dans leurs entreprises, qui souvent sont couronnées de succès.

Plusieurs, après des années laborieuses passées à Paris ou ailleurs, voient la fortune leur sourire. D’autres sont récompensés de leurs efforts par une honorable aisance ou un agrandissement de leur petite propriété, mais ceux-là sont le petit nombre et leur réussite n’empêche pas l’émigration d’avoir des inconvénients.

Au point de vue religieux et patriotique, la commune de Fresselines tient un rang honorable. Les familles nombreuses n’y sont pas rares. Le sang de ses enfants a coulé sur les champs de bataille. Les idées subversives, malgré les efforts des sans-Dieu et des sans-patrie, n’ont pas pénétré dans ces cœurs vivifiés par le christianisme et où Dieu, la patrie, la famille tiennent une si large place. Malgré le tribut payé à l’indifférence par un certain nombre, la masse, cependant, reste attachée au Christ rédempteur, à la foi de ses ancêtres.

Ce livre est également disponible, dans sa totalité, 
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MAJ 05/03/2022